L’article 150-0 A du code général des impôts (CGI) pose le principe de l’imposition des plus-values dégagées à l’occasion de la cession de valeurs mobilières. Depuis le 1er janvier 2013, elles sont soumises au barème progressif de l’impôt sur le revenu après application éventuelle d’un abattement pour durée de détention. Antérieurement, elles étaient imposées selon un taux proportionnel sans qu’aucun abattement pour durée de détention ne soit applicable.
L’article 150-0 D prévoit l’imposition des compléments de prix suivant le même régime que les plus-values mais l’administration fiscale subordonnait l’application de l’abattement pour durée de détention à la condition que celui-ci ait été appliqué préalablement à la plus-value de cession.
Il ressortait de cette doctrine administrative deux éléments préjudiciables. D’une part, si à l’occasion de la cession aucune plus-value n’était constatée, de sorte qu’aucun abattement pour durée de détention n’ait pu être appliqué, il ne serait pas possible ultérieurement d’appliquer un abattement sur le complément de prix. D’autre part, si au moment de la cession la plus-value n’ouvrait pas droit à un abattement pour durée de détention, parce qu’elle était intervenue avant le 1er janvier 2013 et donc soumise simplement au taux proportionnel, le complément du prix payé ultérieurement, même après 2013, ne pourrait davantage en bénéficier.
Ainsi l’administration subordonnait l’application de l’abattement pour durée de détention au complément de prix à l’application préalable de l’abattement à la plus-value de cession.
Le Conseil constitutionnel s’est prononcé sur la conformité de cette condition préalable à la Constitution dans une décision 2015-515 du 14 janvier 2016 alors qu’il était saisi dans le cadre d’une question prioritaire de constitutionnalité (QPC). Il a jugé la disposition conforme au principe d’égalité devant la loi et les charges publiques en posant néanmoins une réserve d’interprétation.
Il a commencé d’abord par relever l’objectif de la mesure. L’intention du législateur était d’appliquer le même abattement à la plus-value de cession et au complément du prix, sans tenir compte du temps écoulé entre ces deux évènements. En cela la mesure est conforme à la Constitution.
Ensuite il a émis une réserve d’interprétation qui suppose que la disposition est bien constitutionnelle que si elle est interprétée dans un sens précis. Ainsi l’abattement pour durée de détention doit trouver à s’appliquer aux compléments de prix, que la cession ait généré ou non une plus-value imposable, qu’elle soit intervenue avant ou après le 1er janvier 2013.
Exemples illustratifs :
-une cession de valeurs mobilières est intervenue le 20 décembre 2012 après 6 années de détention. Une plus-value est dégagée et est soumise au taux proportionnel alors applicable, sans aucun abattement pour durée de détention.
Un complément du prix est versé en 2015. Conformément à la décision du Conseil constitutionnel, celui-ci pourra bénéficier d’un abattement pour durée de détention de 50% (car détention pendant 6 ans).
-une cession de valeurs mobilières est intervenue le 20 décembre 2013 après 6 années de détention. Aucune plus-value n’est dégagée.
Un complément du prix est versé en 2015. Celui-ci pourra bénéficier d’un abattement pour durée de détention de 50% (car détention pendant 6 ans).
-une cession de valeurs mobilières est intervenue après une année de détention. Une plus-value imposable est dégagée mais elle ne peut bénéficier d’un abattement pour durée de détention car la cession est intervenue moins de 2 ans après la cession.
Un complément du prix est versé deux années après la cession. Celui-ci ne peut pas non plus bénéficier d’un abattement pour durée de détention.v